2012 64

2007 63

2006 62

2005

2004 61 60

2003 59 58 57' 57

2002 56

2001 54' 54 53 52

2000 51 50 49 48

1999 47 46 45 44 43

1998 42 41 40 39 38 37

1997 36 35 34 33 32 31

1996 30 29 28 27 26 23 22 21 20

1995 19 18 17 16 15 14 13 12 11

1994 10 09 08 07 06 04 03

1993 02 01 00

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Aredje 18, novembre 1995

COUGNEÛS D' mATANTE !

Si les Slugs était un groupe de la banlieue de Los Angelès, notre disque se serait appelé Mother Fuckers. Mais les Slugs sont un groupe de Bruxelles, quelque part dans la banlieue de Fleurus, et Cougneûs d' Matante colle beaucoup mieux à nos racines.

La pochette annonce la couleur: le souvenir de Namêche hante ce disque. Deux morceaux sont directement inspirés de cet épisode funeste (ceux qui tombent des nues et ne comprennent pas de quoi il est ici question peuvent nous demander le numéro spécial d'Aredje que nous avions concocté à la suite de ces évênements): Malaise (du nom du Lieutenant qui dirigeait l'opération) et Péchon d'avril (du nom d'un poisson qui assistait à l'opération), l'un en wallon l'autre en français.

Les deux langues sont d'ailleurs également représentées sur le CD: quatre chansons en wallon et quatre chansons en français, voilà qui nous fait huit titres, le compte est bon.

Mougnî Cougnî Couchî et Payasse traite de l'exploitation et de l'aliénation du prolétaire wallon. Deux titres dont la connotation sociale ne devrait échapper à personne, mais je m'attend à tout.

Avec Un deux... Un deux..., Von s'en prend aux va-t-en-guerre, espèce qui se fait discrète par chez nous depuis quelques années mais qui prolifèrent de manière inquiétante en d'autres contrées, pas si lointaines, d'ailleurs. Prudence et vigilance s'imposent plus que jamais.

Grunge Albert est une charge satyrique sur notre vibro-souverain Albert deuxième du nom. J'en tremble encore.

Enfin, la dive bouteille n'est pas oubliée avec Tchéssaut et Tertos au cabaret. Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse. Ici, le flacon fleure bon le péquet Chassart.

Claude François avait ses claudettes, Patrick Sébastien (sale con) a les petits chanteurs d'Asnières (pauvres gosses), et les Slugs ont la Meute du peuple Libre, c'est autrement plus sympathique. On leur doit le neuvième morceaux du disque, Patate, chanté autour du feu, avec accompagnement à la guitare folk par Akéla qui n'est autre que Jef himself, le guitariste qui booste.

Sur ce, je vais me coucher. Je me souhaite une bonne nuit.

BINAM'...

P.S.: je ne sais pas comment j'ai pu résister à la tentation de vous dire que Cougneûs d' Matante est à ce jour le meilleur album des Slugs de cette fin de millénaire.

AUTO-DISTRIBUTION !

C'était devenu une habitude, à chaque nouveau disque, nous ressortions la même rengaine: "si votre disquaire n'a pas nos disques dans son magasin, il faut lui dire de contacter Big Bang ".

Cette fois, on change tout et on recommence: si votre disquaire patati patata, il faut lui dire de contacter Aredje (c'est nous) au 02/537.79.80 (c'est chez nous, il y a un fax et un répondeur), voire au 27 avenue de la Jonction à 1060 Bruxelles (c'est chez nous itou).

Veut-ce dire que le nouveau CD des Slugs ne sera pas distribué par Big Bang? Tout à fait, et je vais vous dire pourquoi!

Mais d'abord un peu d'histoire. Pas de Big Bang dans notre cosmogonie, il arrive plus tard, bien plus tard. Comment faisions-nous avant? C'est simple. Quand on sortait un disque, on le vendait aux copains, on le vendait aux concerts (merci Marteau, merci Félicia) et on faisait le tour des disquaires. C'était relativement inefficace, c'était surtout franchement laborieux puisqu'aucun membre du groupe n'avait de permis de conduire et encore moins de bagnole; les déplacement se faisait donc en train, en stop voire à vélo. Pourtant, ça nous suffisait et nous n'avions nulle envie de fonctionner autrement.

Il avait fallu l'énergie, la sympathie, la folie de Pierre Istace pour nous faire changer d'avis. Tandis que nous préparions l'album Vocations, Pierre se lançait dans l'aventure de la distribution avec Big Bang. C'est d'alors que date notre rencontre. Ce fut l'occasion de soirées mémorables et Vocations se retrouva dans la besace de Pierre.

Cela fonctionnait très bien et pourtant aujourd'hui, nous revenons en quelque sorte au point de départ. Et je vais vous dire pourquoi!

Commençons par les causes que vous avez tort d'imaginer.

Il n'y a pas de brouille, pas de discorde, pas de mésentente avec qui que ce soit de chez Big Bang. Que du contraire, nous nous entendons très bien avec plusieurs des personnes qui y travaillent (salut à Christophe, à Georges, à Patrick,...).

Nous n'avons pas de reproches quant aux ventes, leur distribution nous semble efficace. Cependant, nous pensons qu'il est possible de vendre plus que ce que nous avons vendus jusqu'ici. Mais nous ne pensons pas qu'un distributeur "normal"puisse le faire. Et je vais vous dire pourquoi!

Pour nous, l'important, c'est de vendre un maximum de disques. Pour un distributeur, le but est aussi de vendre un maximum de disque. A première vue, la motivation est identique, ce n'est pourtant qu'une apparence. En effet, notre but est de vendre un maximum de nos disques, celui du distributeur est de vendre un maximum de disques, pas forcément le nôtre.

Un distributeur ne peut pas se permettre de diminuer sa marge sur un article de son catalogue pour privilégier ce disque en particulier par rapport aux autres qu'il continuerait à vendre à prix plein. Nous, nous le pouvons. Et nous allons le faire. Il ne le peut pas parce qu'il doit payer les gens qui travaillent avec lui. Nous, nous le pouvons parce que nous sommes bénévoles. Donc, nous allons essayer de le faire. Dès demain.

Conséquence directe de ce nouveau système, les prix en magasins et les prix via notre VPC Chal é Asteure seront désormais fort proches voire identiques. Pour arriver à ce résultat, nous allons vendre nos disques un peu plus cher par correspondance mais surtout franchement moins cher chez les disquaires. Ainsi le Cougneûs d' Matante des Slugs coûtera 360 frs + port en VPC (soit 418 frs si vous le commander seul) et plus ou moins 420 frs en magasin. L'avantage pour vous est évident, quel est le nôtre? La possibilité pour nous de faire une publicité plus large au VPC puisque dorénavant il ne sera plus un concurrent déloyal pour les disquaires. Ainsi, par exemple, il y aura maintenant une liste VPC dans les livrets de nos Cds.

Normalement, tout ça devrait créer un supplément de boulot non négligeable. J'espère que nous n'en aurons pas marre dans deux semaines. On verra. Et si on en a marre dans deux semaines, ou dans deux mois, ou dans deux ans, on trouvera autre chose.

BINAM'...

VIGIPIRATE

Les terroristes qui voudraient s'introduire sur le territoire français ont intérêt à se faire très discrets, la police veille. Exemple: à Paris, gare du nord, elle a stoppé à temps 25 élèves danois qui portaient des T-Shirts avec l'inscription "Chirac, non!". C'était, pour les policiers, une offense manifeste au président de la République, suceptible d'entretenir un climat anti-français. Les essais nucléaires, eux, ne sont pas inquiétés. Leur rapport avec un hypothétique sentiment anti-français est sans doute plus délicat à établir.

BINAM'...

LE PAPE ET NOUS

Dans le fanzine Night and Light (rue du parc 8 à 4920 Remouchamps), Noëlla constate qu'il va finir par devenir difficile de dissocier Binamé du pape.

Ce sera encore plus vrai après le débat que l'émission Parce qu'on est jeunes de Club RTL consacre au pape, justement. EsGibt sera de la partie, face à une brochette de jeunes junkies accro à l'opium du peuple (que fait la police?). Ce jour-là, on vous autorise à regarder Club RTL, mais après, de grâce, retourner au plus vite sur Arte.

L'entarteur Noël Godin, qui tient (tenait?) une chronique dans un torchon télé, nous offre une autre apparition commune du couple Binamé-pape. Cela ne suffira pas pour qu'on vous autorise à acheter Télé-Moustique mais on vous donne la permission de le lire chez votre libraire à condition que vous vous limitiez à la rubrique Cest pas de la tarte qui se trouve en page 58.

Le Canard Enchaîné m'offre une conclusion rêvée avec un articulet bien envoyé qui témoigne d'une exaspération que nous ne comprenons que trop bien. Ces quelques lignes exprime on ne peut mieux ce que nous inspire aujourd'hui Jean-Paul.

BINAM'...

MEDIA-DEVOTION

Noël Godin alias Georges le Glouipier nous en appprend de bonnes sur l'article de Télémoustique dont il est question ci-dessus et que vous avez peut-être pu lire chez votre coiffeur. Le centre de la page était bien occupé par la pochette de notre 45t, "En juin fume ce qu'il te plaît", comme l'avait choisi le chroniqueur. Par contre, vous auriez dû y lire un extrait des paroles de "Roma Capote Maudit"mais la Rédaction en a décidé autrement, expliquant à Noël Godin que des passages de son article ont sauté... pour des contraintes de mise en page. Il les rassemble alors pour sa chronique suivante, qu'il poste prestement. Colère de la rédactrice en chef, et suppression illico de la rubrique de Godin dans Télémoustique. On lui explique qu'il pouvait toucher à tout (c'est bien pour cela qu'il avait été sollicité) SAUF: à la famille royale, aux directeurs de chaînes, à la religion, ni inciter à la débauche. Il nous manquait vraisemblablement quelque chose sur les directeurs de chaînes: nous commençons ce mois-ci avec MTV. Et voici pour la RTBF et RTL...

Deuxième épisode en effet: Godin est l'invité du Jeu du Dictionnaire de Jacques Mercier (Radio Une, 17h, 23-27 oct.). Godin leur narre ses déboires avec Télémoustique, l'équipe s'offusque de cette censure et l'encourage à en parler. Comme tout invité de l'émission , Godin apporte quelques disques de son choix. Parmi d'autres joyeusetés, Claude Semal, et René Binamé. Ceux-là même qui fustigeaient Télémoustique une minute plus tôt manquent de périr d'infarctus. Tollé général: le Jeu du Dictionnaire ne survivra pas à Godin. Il participera finalement à cette semaine, mais, cas unique, les disques de l'invité sont censurés.

Enfin, voici ce qui risque sans doute d'être le troisième épisode de cette petite saga au Royaume des Dévots: nos morceaux papaux ont été filmés en répétition par une équipe de Club RTL, pour l'émission "Parce qu'on est jeune"diffusée le 4 novembre. Pire, je participerai au débat, enregistré en différé et remonté avant diffusion. Si je ferai mon possible sur place, je ne manquerai pas, après diffusion, de me prononcer sur les choix de montage, c'est-à-dire de coupure. Mettons Club RTL au défi de veiller, plus que le Télémouche-à-M, à la moralité de la jeunesse. En particulier concernant l'honneur de la Famille Royale et des directeurs de chaîne de télévision, la sauvegarde de la Religion et la prévention contre la débauche. Tout courrier sur ces thèmes peut déjà être adressé à:

Furieusement vôtre, Télémoustique, 109 rue Neerveld, 1200 Bruxelles.

Nous serons en tout cas présents le mercredi 15 novembre à 12h30 à la FNAC de Bruxelles (City 2), au débat organisé par l'Association des Téléspectateurs Actifs sur le thème... des débats télévisés (rens./rés°.: ATA, 02/539.19.79). Participeront: l'ineffable Baudouin Cartuyvels (Ecran Témoin, RTBF), Pascal Vrebos (Controverse, RTL), ainsi que l'animateur de "Parce qu'on est Jeune".

A bon entendeur,...

ESGIBT...

AIME TA TI VI

Ca y est, ces éternels râleurs de Binamé vont nous pousser leur chansonnette ronchonneuse à propos de MTV, tout ça parce qu'on ne les y a jamais vus... Oublions les Binamé, ouais-ouais-ouais, et laissez parler le consommateur qui grommelle en moi. C'est une affaire entre mon fauteuil, mes canettes, ma télé et moi. Quoi de plus doux que de dodeliner de la tête, tout avachi d'un lendemain de veille brumeux, face aux faciès sauvages du petit écran version rock? Sur notre chaîne de service public, hormis quelque improbable séquence d'un trop rare Intérieur Nuit, on aurait du mal à s'abreuver de saturations électriques. Dommage.

MTV... Y a-t-il vraiment des questions pertinentes à se poser sur une chaîne de télé qui ne fait pratiquement que diffuser des clips, à peine entrecoupés par les apparitions furtives de quelques présentateurs-tatrices au look grungy-propret façon british? D'accord, MTV, c'est avant tout "commercial", mais personne n'est dupe... Et de toute façon, les mécontents n'ont qu'à zapper.

Prenons un peu de recul. Ici, nous captons MTV Europe. Basée à Londres, la chaîne fonctionne depuis 1987 (1). Elle alterne les programmes américains et les programmes réalisés à Londres. L'Europe à la sauce anglo-saxonne. Reçue en 1995 par 61 millions de foyers dans 37 "territoires", elle dispose d'une potentialité de 200 millions de téléspectateurs, c'est-à-dire plus qu'aucune autre chaîne en Europe. Le Benelux et l'Irlande demeurent les seuls pays européens qui n'ont pas accepté de payer le décryptage; les émissions n'y sont donc pas encore codées.

MTV existe aux USA depuis le début des années '80. Son extension mondiale date des années '90: MTV Latino (Amérique latine), MTV Asia (en anglais, en hindi, en chinois, voire en sous-titrages, comme en coréen), MTV Japan, sans compter la pénétration en Afrique, et la création prévue de MTV South-Africa. Depuis 1987, MTV appartient à l'empire audio-visuel américain Viacom, passé sous le contrôle de Mr Summer Redstone et sa "holding"NAI (National Amusement Inc). Le patrimoine de ce groupe est vertigineux: il possède des dizaines de chaînes de télé, de stations de radio, des centaines de salles de cinéma, de magasins de vidéos et même des parcs d'attractions. De fonctionnement peu onéreux, MTV est l'enfant chéri de cet empire. Dans le monde, "elle représente près de 300 millions de foyers, soit plus du quart des familles de la planète possédant un téléviseur, sans compter les ventes des ses productions à d'autres chaînes"(1).

C'est dire l'ampleur du marché, l'espace de diffusion, la capacité de ce réseau à imposer des modes, et la tendance à l'uniformisation: les groupes anglo-saxons au succès taillé sur mesure créeront forcément des émules locales à travers le monde (comme les Slugs qui s'emmêlent les pinceaux entre punk, ska et post-grunge - c'est pour rire, gamin!). En cinéma, MTV est une vitrine de choix pour les productions Hollywoodiennes, y compris via les fameux "original soundtracks". Les éditeurs de disques qui cèdent gracieusement la diffusion des clips ne s'y trompent pas; les annonceurs qui ciblent "jeune"ne s'y trompent pas non plus: MTV est un média exceptionnel, à l'échelle planétaire. On façonne aujourd'hui le succès d'un produit ou d'un groupe à une allure fulgurante.

A ce propos, ne nous croyons pas trop à l'abri du matraquage; nous sommes tous sensibles à la répétition, pourvu que se crée un minimum de sympathie. Qui n'a pas un jour déchanté en écoutant chez lui un album décevant, mais dont la plage-locomotive avait été rabâchée sur MTV (c'est ainsi donc que j'ai acheté le dernier Slugs). Soit, rien de très nouveau dans tout cela... Pourtant, une question demeure: quel rôle MTV prétend-elle assigner à la musique, et quelle rôle la musique joue-t-elle réellement, ainsi diffusée. Cette question dépasse d'ailleurs le cadre de MTV, mais l'ampleur mondiale du phénomène en fait un exemple révélateur.

L'Evangile selon MTV (plus édulcoré en Europe qu'en version américaine), la Bonne Parole du rap/rock business servie sur plateau-télé, c'est en vrac: la liberté d'expression, la révolte adolescente, la contestation, l'impertinence, les revendications de la génération en ébullition... C'est en gros l'image mythique du rock rebelle. Parlons-en.

La révolte, comme pure attitude, peut se concevoir sans idées très construites. Mais quand la cible est le "grand tout", on rate facilement toutes les cibles. La révolte, ce n'est pas encore de la subversion. Quand la révolte a quelques idées, fut-ce des idées de révolte, rien n'est encore gagné mais il y a de l'espoir. De l'espoir de subversion. Y a-t-il des traces d'idées dans le rock, voire même en chanson française? Pour sûr, mais ne nous emballons pas. Toute la carrière d'un chansonnier, à fortiori d'un groupe rock, ne remplira jamais plus qu'un bouquin. Allez, comptons un second bouquin pour les interviews (en quelle année machin a remplacé truc, et pourquoi tel studio plutôt que tel autre, genre MTV News...).

Prenons maintenant n'importe quelle idée, consultons le fichier d'une bibliothèque universitaire. Résultat: des centaines de livres, pour une seule idée. Sachons donc proportions garder: une idée dans une chanson se limite à l'art de la formule et du slogan. C'est ici que se joue le savoir-faire du poète: jouer du verbe juste et de la subtilité en très peu de mots.

Mettons-nous à présent dans la peau d'un boss de MTV Networks, à fortiori de Viacom ou NAI (voir plus haut). Il faut se rendre compte que pour eux, la musique en tant que telle n'existe pas. Ils savent qu'ils vendent un produit, coté en bourse, qu'ils passent des contrats de diffusion, des contrats publicitaires, des accords avec des chaînes. Quant aux idées, à la révolte adolescente, c'est le précieux emballage de leur camelote. Ils paient des gens -parfois sincères et consciencieux- pour mettre cet emballage au point, pour doser savamment l'impertinence. Et en face des "Copkillers"des banlieues ricaines, pensez-donc, on s'est définitivement fait recaler comme des enfants de choeur avec "La Moustache".

Ecoutons William Roedy, patron de la branche internationale de MTV nous définir le but de sa vie: "Abattre les barrières culturelles, sociales et politiques entre les hommes... et faire en sorte que MTV soit dans tous les foyers de la terre". Sa devise: "Ne respecter aucune règle, esquiver, se faufiler, et ne jamais accepter qu'on vous refuse quoi que ce soit"(1).

Autrement dit, ouvrez-nous vos marchés au nom de la liberté d'expression de mes capitaux. Prolétaires de tous pays, unissez-vous: MTV pour tous et tous pour MTV. Version provo' ou humaniste, imagine-t-on sérieusement qu'une chaîne comme MTV -flanquée de ses puissants sponsors- relaie des idées réellement subversives, c'est-à-dire remettant en cause le système dans son ensemble, s'attaquant au cannibalisme capitaliste, alors que MTV est un redoutable pilier de ce système, un de ses fers de lance?

"Grâce à la force unificatrice des satellites, la culture populaire américaine enracine les valeurs libérales occidentales dans les sociétés les plus diverses, mieux que n'importe quel discours"(1).

On peut "headbanger"tant qu'on voudra à l'antenne, à fortiori avec conviction, le fond du message demeure ultra-conventionnel, et gagne fameusement en efficacité dès lors qu'il passe pour de la rébellion. Consommez, consommez, consommez. Vous êtes libres, puisque vous "choisissez"ce que vous consommez, puisque vous pouvez voter démocratiquement pour élire vos encravatés nationaux,... et envoyez-nous dans la foulée une carte postale pour les MTV Awards. Voilà le champ d'action du citoyen du monde à la sauce MTV.

Si aucune révolte consistance, aucune revendication réellement subversive ne passera sur antenne, il y a lieu en retour de se méfier de tous les pseudo-messages effectivement diffusés. Certes, même s'ils ressemblent à de mauvais spots pour Coca, les séquences incitant à l'usage du préservatif valent mieux que rien, valent mieux que de céder aux lobbies réactionnaires prônant la censure et l'abstinence. Mais ne capitulons pas sur l'essentiel: MTV caresse la "culture jeune"dans le sens du poil pubien, et n'investira dans la recherche contre le Sida que le jour où il y aura suffisamment de malades pour que cela soit aussi rentable que de nous pousser à acheter de joyeuses sous-merdes punkoïdes à coup de clips gesticulatoires.

Grâce aux spots "engagés"distillés par MTV, on peut dorénavant tenir pour sagement sympathico-soporifique: antiracisme, pacifisme, écologisme, etc. Devrions-nous gober que dans l'empire financier tentaculaire de Viacom, les noirs ne sont jamais discriminés, que les patrons sont gentils, que les inéquités sociales sont abolies, que les produits diffusés sont fabriqués sans atteinte à l'environnement, que les décideurs n'investiront jamais un dollar dans l'industrie d'armement? Laissez-nous ricaner.

On est d'ailleurs en droit de se demander ce que signifient ces mêmes messages dans nos démocraties, sinon du pur habillage destiné à masquer les vrais rapports de force économiques et sociaux. La similitude n'est décidément pas un hasard. Pour peu, on croirait voir sur MTV des messages de Noël d'Albert II, version jeune et branché. Le roi sur MTV... ne rions pas trop vite. Simple question de coutume locale. Au début de la Guerre du Golfe, MTV USA a diffusé le message de propagande guerrière du président Bush. La boucle est bouclée. Aimons MTV comme Mr Summer Redstone de Viacom/NAI nous aime. Je vous jure qu'ensemble on va changer le monde, lui, mon fauteuil, mes canettes et moi.

A moins qu'à l'occasion nous ne accoudions au bar pour nous inventer une bonne petite révolution de derrière les fagots? Le rendez-vous est pris.

ESGIBT...

PS: en gros, relisez le tout en remplaçant MTV par MCM.

(1) Yves Eudes, "MTV, musique, télévision et profits planétaires", in Le Monde Diplomatique, août 1995.

HUMOUR ?

Deux jugement symétriques de la 17ème chambre correctionnelle de Paris sont révélateurs. A ma gauche Riss, coupable d'une série de dessins anti-cléricaux dans Charlie-Hebdo (tous les jeudis, 70 frs, achetez-le les yeux fermés, ça vous aidera à les ouvrir). A ma droite (extrème), Bouvard et Perrot, coupable d'une blague raciste dans Les Grosses Têtes sur TF1.

La blague de Bouvard: "qu'est-ce qui vole d'immeuble en immeuble? C'est Superman! Qu'est-ce qui vole de supermarché en supermarché? C'est musulmane!". Le tribunal considère que ce style d'humour ne constitue pas un délit. Il admet que laisser entendre que les musulmanes sont des voleuses est une imputation "assurément acerbe, outrageante ou méprisante", mais précise qu'elle est "dépourvue de toute exhortation à la discrimination, à la haine ou à la violence".

Riss, quant à lui, imaginait, en représailles aux commandos anti-I.V.G., d'organiser des commandos anti-Bon Dieu qui, par exemple, chieraient dans les bénitiers. Le même tribunal a estimé que ces dessins constitue un "appel à une action violente immédiate, une exhortation à la profanation des lieux de culte et plus précisément des objets sacrés"dans le but de susciter "la haine, la violence et la discrimination envers la communauté des catholiques". Jugement: Charlie doit verser 11.000 frs de dommages et intérêts (66.000 frs belges) à l'A.G.R.I.F. (l'association intégriste qui avait porté plainte) et payer une amende de 15.000 frs (90.000 frs belges).

Acquitement pour les prosélytes de la connerie, condamnation pour ceux qui essaye de s'en protéger. La France me semble décidément bien mal engagée.

D'autant plus que l'extrème-droite ne se contente pas de gagner devant les tribunaux. Philippe Val, rédac-chef de Charlie Hebdo, peut en témoigner, qui avait participé à la nouvelle émission de Dechavanne: il s'est fait tabasser à la sortie des locaux de TF1 par des intégristes catholiques. Peut en témoigner le lycéen tabassé devant son école parce qu'il avait déchiré un tract que lui tendait des militant du Front National de la Jeunesse.

BINAM'...

NOUVELLES DU FRONT

A Toulon, à Orange et à Marignane, les trois villes tombées aux mains du Front National lors des dernières élections municipales, la stratégie des nouveaux maires est claire: pas de vagues, pas de coup d'éclat, profil bas jusqu'aux prochaines élections législatives.

Mais c'est plus fort qu'eux, ça les démange tellement qu'ils finissent par craquer.

Le maire d'Orange s'en prend à la culture: il n'a pas pu résister au plaisir de couper les vivres aux chorégies et au centre culturel Mosaïques. Déclaration du maire Jacques Bompard: "Ils n'intéressaient pas l'Orangeois moyen, mais un poignée de cultureux de gauche... Les gens ne regarde pas Arte. Ils ne vont pas payer pour voir des pièces ésotériques". C'est clair, l'ennemi, c'est la culture.

A Toulon, c'est Ahmed Touati, un animateur municipal de quartier qui écope. Conscient qu'en continuant son travail sur le terrain, il aurait servit de caution au Front National, il avait demandé à être muté aux archives municipales, un poste plus neutre. Le maire a choisi de l'affecter au service de nettoyage. C'est clair, la place d'un maghrébin, c'est en rue avec un balai.

A Toulon encore, au début du mois de septembre, la mairie refusait d'accorder une salle des fêtes à une association qui désirait y tenir une simple réunion (pas même un concert ou une soirée).

Problèmes avec le voisinage, risque de débordement? Pas du tout, le prétexte du refus est le plan Vigipirate. La mairie considèrerait que les conditions de sécurité ne sont pas réunies. La réunion constituerait un cible de choix pour les terroristes? Mais non, le motif du refus est bien plus simple. L'association concernée est le Rassemblement des Citoyens pour la Démocratie qui avait invité à sa réunion les associations Alarmes Citoyens de Marignane et Faire Face d'Orange. Des associations démocrates des trois villes tombées aux mains du Front qui choississent de se réunir dans une des villes en question, c'était une véritable provocation, le maire de Toulon ne s'y est pas trompé.

BINAM'...

ROCK 'N' DOPE

Le samedi 21 octobre dernier, à Waha, Promogroupes et le Centre Culturel de Marche-en-Famenne ont relevé le défi d'une rencontre sur un sujet sensible: le cannabis. Dès 16h30, le théâtre-forum fit salle comble avec quelques 150 personnes. Thème du spectacle "Hasch... Chiche?": les déboires d'un sympathique gaillard décidé à ouvrir, avec une amie, un "cannabistrot"ayant pignon sur rue. Dans les locaux fin prêts pour l'ouverture se succèdent une série de personnages dont les attitudes, intérêts ou convictions pimentent le thème.

Théâtre engagé, "autoproduit"et non professionnel, la troupe de la Zone (et des "Acteurs de l'Ombre") ont su se jouer des défauts du genre pour nous proposer un spectacle crédible et drôle, à la mise en scène inventive. Selon le principe du théâtre-forum, la pièce a été rejouée, avec possibilité pour les spectateurs de prendre la place de l'un des personnages et d'influer ainsi sur le cours du scénario (en l'occurrence l'échec du "cannabistrot"au profit d'une discothèque sous ecsta'). La mayonnaise a pris, des "spect-acteurs"se sont succédés, parfois avec brio, tandis que Thierry, maître de cérémonie, veillait à ce que l'ensemble ne perde ni le fil ni le rythme.

Un regret toutefois: la relative longueur de la pièce, ainsi que le programme assez serré (théâtre-vidéo-concerts) n'a pas permis de ménager un temps de débat indépendant des échanges du forum. Certains aspects du problème ont monopolisé l'attention (caractère inoffensif du cannabis par rapport aux effets néfastes des drogues autorisées, par ex.) au détriment d'autres sujets importants: conséquences catastrophiques de la prohibition, en particulier quant au trafic des drogues "dures"(aspect économique et social); la question justement de cette distinction douce/dure; les causes et le rôle des drogues dans une société où tout est marchandise (point de vue politique); les absurdités de la répression au quotidien. Sur ce dernier point, l'absence de discussion est d'autant plus regrettable que quelques gendarmes s'étaient déplacés, à titre privé, et auraient peut-être donné leur avis (ils sont payés d'habitude pour faire respecter les lois, pas pour en discuter). J'aurai donc finalement noyé tout cela dans la polémique de comptoir, la chope et les décibels, avec les nouveaux morceaux des Slugs en un survolté bouquet final, clac-boum.

Espérons en tout cas que d'autres initiatives du genre suivront celle de ces "pionniers": l'intérêt existe, la prohibition n'a de loin pas eu raison de la volonté de réfléchir et de débattre. Quant à la troupe de la Zone, elle entend bien promener "Hasch... chiche?"d'une scène à l'autre; surveillez les agendas et ne les manquez pas.

ESGIBT...

"Hasch... chiche?"sera le 9-11 à Eupen, le 24-11 à Verviers, le 9-12 à Bruxelles, le 9-01 à Rixensart.

Plus d'infos chez Ingrid Muller, 27 rue Méan à 4020 Liège, 041-44.58.88.

LI WALON... NOSSE LingADJE !

Aredje, chal é asteure! Quelques mots wallons que vous comprenez peut-être, ou peut-être pas, qui peuvent se traduire par Désordre, ici et maintenant.

Nous avons choisi pour notre label, notre zine et notre VPC des noms wallons, nous chantons régulièrement en wallon, surtout les Slugs d'ailleurs qui sur leur dernier CD (on enfonce le clou) le font un morceau sur deux.

Mais nous ne parlons pas souvent de ce qui se passe dans la mouvance wallonne non-rock'n'roll.

Pourtant, il se passe des choses, beaucoup, partout. Et pas seulement entre vieux comme on le croit généralement et comme le laissit à penser l'émission l'hebdo consacrée à la langue wallonne que la RTBF a diffusé il y a quelques semaines. Réparons ce manquement en présentant d'un coup quatre initiatives: un T-shirt, un cours de langue wallonne et deux ateliers de conversation-lecture-écriture.

Ces projets ont en commun l'ex-guitariste-fondateur de René Binamé et les Roues de Secours Laurent Henschel qui cumule les rôles d'auteur du cours, d'éditeur du T-shirt, et d'animateur des ateliers.

LE COURS

Avec Li walon, rade èt bin, en 13 leçons, vous apprendrez de manière progressive à parler, lire et écrire le wallon. Les leçons sont abondamment illustrées et accompagnées de jeux et d'exercices corrigés. Une cassette audio reprend tous les textes des leçons.

Le syllabus (une centaine de pages) et sa cassette sont vendus au prix de 500 frs. Pour l'obtenir, contacter Lucien Somme (rue de l'Agasse 77, 5030 Djiblou, 081-61.10.32) ou Francis Collin (rue Ch. Lahaye 16, 5300 Andène, 085-84.28.03)

LES ATELIERS

Depuis plusieurs années, des cours de wallons sont organisés à Namur. Il y a trois niveaux. Le premier est ouvert à tous et toutes, s'emploie a réactiver la connaissance du wallon, latente chez bien des gens, de réveiller le plaisir de s'exprimer en wallon. Les niveaux suivant sont destinés à ceux qui ont suivis les cours auparavant ou qui ont déjà une boone connaissance de la langue. Les cours ont lieu deux fois par mois et coûte 500 frs pour l'année. Infos chez Lucien Somme, 081-61.10.32.

Il y a aussi à Hastière (en bord de Meuse) un atelier basé sur le cours Li walon, rade èt bin. Chaque leçon coûte 100 frs. Infos chez Anne-Marie Sacré, 082-64.44.57.

LE T-SHIRT

"Ça serè l' moumint d' mete on bea novea t-shirt; onk avu ene bele imådje dissu: Si vos l' voloz riçûre, c'esst åjhî; vos n'avoz k'a payî oûy seûlmint 400 F sul conte 063-1258362-16 (avu l' mincion "t-shirt"eyè vosse nom). Ni tårdjîz nén, i gn a nén des miles!"

Donc, pour vous procurer le T-shirt, il suffit de versez 400 frs sur le compte 063-1258362-16 (avec T-shirt et la taille en communication). Vous avez le choix pour la taille entre XXL, XL, L et M, précisez le également .

BINAM'...


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