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LE SAMEDI 1 AVRIL 1995, A NAMECHE. UN CONCERT ROCK EST INTERROMPU PAR UNE DESCENTE "ANTI-DROGUE"PARTICULIEREMENT MUSCLEE.
DEMONSTRATION DE FORCE, INTIMIDATION, BRUTALITES AVEUGLES ET ARRESTATIONS ARBITRAIRES.
La répression se lit sur son visage plat, son regard suinte l'ordre et je sens bien qu'il ne m'aime pas. Il est flic comme d'autres sont curés. (in Vocations, chanson de René Binamé)
Pas besoin de cervelle pour porter un uniforme, suffit d'une mentalité de flic, suffit d'être moustachu dans l'âme. Si tu aimes le lotto, le footballe et RTL, découvre la chaleureuse ambiance d'une caserne, d'un commissariat. (in La Moustache, chanson de René Binamé)
Flico, Flico, el renard rusé c'est né twè (in Flico, chanson des Slugs)
Samedi 1er avril, ou plutôt dimanche 2 avril, quatre heures du matin, soulagement devant la caserne de gendarmerie de Namur, le dernier "prisonnier"est libéré. La nuit n'est pourtant pas finie. Il est encore trop tôt pour essayer de comprendre ce qui est arrivé, il faut retourner à Namêche ranger la sono et le matériel abandonné sur scène, tandis que les organisateurs donnent les derniers coups de raclette.
Quelques heures plus tard, nous sommes à peine de retour à Bruxelles et, très vite, les coups de téléphone commencent à pleuvoir: inquiétude quant au sort des interpellés molestés, incompréhension, colère, indignation, volonté de réagir, propositions de témoignage.
Ces conversations nous permettront de reconstituer la chronologie des faits et de constater que l'indignation était générale dans le public. La veille, bien qu'aux premières loges, le nez collé aux événements, nous n'avons pas compris grand chose. Chacun de nous n'est au courant que de sa propre histoire. Et encore. Ce n'est que grâce au récit des spectateurs qui étaient avec lui la veille au balcon du foyer Jules Bodart qu'EsGibt sait que c'est à coup de pied que les gendarmes le frappaient. La veille, sans lunettes et plaqué au sol, il se préoccupait plus de limiter l'effet des coups que de les identifier.
En quittant les gendarmes, nous leurs avons promis de ne pas laisser l'affaire sans suite. C'est le moment de tenir parole. C'est ainsi que nous avons porté plainte auprès du Procureur du Roi de Namur. Que nous avons diffusé un communiqué de presse relatant les faits et exposant nos réflexions. Que nous avons contacté plusieurs responsables politiques comme Messieurs Erdekens et Close, respectivement bourgmestres d'Andenne et de Namur, ou Monsieur Mahoux, ministre de la culture.
Notre but est clair: pour éviter la répétition d'incidents tels que ceux de Namêche, à nos concerts comme à tout autre, il importe de les répercuter le plus largement possible, de les analyser avec recul, en ce qu'ils procèdent d'un état d'esprit inadmissible.
Les réactions seront nombreuses, surtout dans la presse régionale, articles dans Vers l'Avenir, La Meuse, Le Rappel, Le Soir, échos sur Canal C (la chaîne télé locale) Radio Contact, Radio Nostalgie, dans le journal parlé de la RTBF et dans Rock à Gogo sur Radio 21.
Un groupe de jeunes qui assistaient au concert ont couché leur indignation sur papier. Ils ont remis cette lettre aux gendarmes d'Andenne, l'ont envoyée à ceux de Namur et publiée dans Andenne-Potin, le toutes-boîtes de la région d'Andenne. Nous reproduisons cette lettre plus loin dans ces pages.
Dany Martin, qui produisait il y quelques années l'émission Perfecto sur Radio 2 (les jeunes y avaient la parole et le résultat n'avait rien à voir avec l'émission affligeante du doc sur Fun Radio. Question: les jeunes ont-ils changé ou le doc a-t-il d'autres motivations que l'équipe de Perfecto?), avertie par la presse, nous a contacté et a rédigé un communiqué de presse de soutien que vous pourrez lire plus loin.
Dans Vers l'Avenir, mardi 4 avril, nous avons pu lire comment le responsable de la descente, le lieutenant Malaise, justifie celle-ci. Nous reproduisons dans cet Aredje les déclarations du Lieutenant et la lettre que nous lui avons adressée pour lui faire part de nos questions et de nos inquiétudes.
Et puisque c'est la prohibition des stupéfiants qui sert de prétexte à cette chasse aux sorcières, nous aborderons aussi l'actualité de l'antiprohibitionnisme en Belgique. A ce sujet, il est important de souligner que les méthodes utilisées par la gendarmerie à Namêche sont inadmissibles en elles-mêmes et pas simplement en regard des quantités ridicules de haschisch saisies. Si le résultat de la descente s'était chiffré en ballots plutôt qu'en brins, cela n'aurait justifié en rien la brutalité des gendarmes.
Tout cela en viendrait presque à éclipser notre actualité discographique. Pourtant, que notre Très, Très Saint Père, qui vient parmi nous en ce prochain moi de juin, se rassure, nous avons quand même trouvé le temps de lui pondre et de lui couver un joli 45t tout à son honneur dédié, à l'instar de notre maxi-CD de l'an passé, dont il rata malencontreusement la sortie, en sortie de bain. Le titre de ce 45t papal, "En juin fume ce qu'il te plaît", risque de donner de l'urticaire au Lieutenant Malaise, qu'il ne croit cependant que nous l'avons choisi en pensant à lui, ce serait trop d'honneur.
Quelles seront les conséquences de cette descente sur les prochains concerts Binamé et Slugs? Non, nous ne céderons pas au délire de certains qui en viennent à faire le boulot des flics à leur place dans l'espoir de ne pas les voir se pointer avec leurs gros sabots. Par contre, une chose est sûre, dorénavant, quand nous chanterons Vocations, La Moustache ou Flico, la conviction sera plus que jamais au rendez-vous.
Aimez-vous les uns les autres, et aimez les flics comme les flics vous aiment, ni plus, ni moins.
BINAM'...
Le samedi 1er avril au Foyer culturel Jules Bodart de Namêche, l'asbl Le Hangar avait invité 3 groupes rock (les Slip's, les Slugs, et René Binamé et les Roues de Secours) à se produire en concert avec le soutien des Tournées Art et Vie de la Communauté Française.
Vers 23h30, tandis que le second concert (les Slugs) se déroule dans une ambiance chaleureuse, devant un public de quelques 200 jeunes ravis, une vingtaine de gendarmes investissent les lieux au pas de charge et procédent à des contrôles d'identité agressifs dans l'obscurité de la salle. Des rumeurs courent: ils chercheraient de la drogue...
Plusieurs incidents violents vont alors se succéder.
Jean-Christophe Pirnay, le claviériste de René Binamé et les Roues de Secours, est brutalement interpellé par un gendarme sur la mezzanine d'où il regardait le concert en compagnie d'autres jeunes. Sans autre raison qu'une volonté d'intimidation arbitraire, il est plaqué au sol (ses lunettes sont endommagées dans la chute), fermement immobilisé par cinq gendarmes et roué de coups, notamment de coups de pieds. Il est ensuite emmené vers un véhicule blindé stationné non loin de la salle, poignets menottés dans le dos. Plusieurs jeunes présents sur le balcon, et maintenus en retrait, témoigneront de la brutalité incompréhensible des gendarmes.
Cependant, les gendarmes investissent la scène, plusieurs membres des Slugs seront brutalisés. Yvon Mandelier, le chanteur, est menotté, bras tordus dans le dos, son tee-shirt est déchiré. Olivier Maniet, le batteur, est brutalement plaqué au sol, menacé du poing et menotté dans le dos. Michel Renard, le guitariste, est maintenu au sol, étranglé par pression du genou et menotté. Ceci s'est produit devant le public héberlué par tant de violence. Tandis qu'Yvon ira rejoindre Jean-Christophe sous bonne escorte, les deux autres Slugs seront emmenés dans les coulisses. Là, à l'abris des regards du public, un gendarme en civil frappe à maintes reprises la tête de Michel contre un mur et une armoire métallique, alors que ses poignets étaient menottés dans son dos. Olivier s'en tirera avec quelques giffles.
Les quatres Slugs et Binamé ont chacun effectué une déposition reprenant ces faits puis ont été relachés un à un de 2h30 à 4h00. Ils ont dés lundi porté plaintes auprès du procureur du Roi de Namur. Jean-Christophe et Michel accompagnent leurs récits de certificats médicaux faisant état des contusions et éraflures diverses dûes aux mauvais traitements subis.
Ces faits nous suggèrent quelques réflexions.
Si l'on en croit le lieutenant Malaise, responsable de l'opération interrogé par le journal Vers l'Avenir, le but était de "rassurer les parents, sans viser en particulier les concerts". Nous craignons que ce but n'ait pas été atteint et ce type d'interventions n'inquiète plus qu'il ne rassure.
Au sujet de la toxicomanie, l'écart se creuse de plus en plus entre les (modestes) avancées législatives, et la politique répressive sur le terrain. Certes, la gendarmerie a pour tâche de faire appliquer la loi telle qu'elle existe actuellement, mais de telles méthodes ne se justifieront jamais.
Au regard des résultats ridicules de l'opération, l'intervention de Namêche apparaît comme démesurée: 6 combis, 2 véhicules blindés, 3 golfs, plus d'une quarantaine de gendarmes pour quatre mégots de joints et un peu de haschish (chiffres de la gendarmerie). S'agit-il d'un raid de prestige et d'intimidation? Dans tous les cas, un discrédit certain est jeté sur la salle, les groupes, les organisateurs, le public. C'est proprement inadmissible.
A plusieurs reprises, la volonté d'intimidation violente a clairement pris le pas sur la recherche de drogue, entachée de confusion déconcertante. Trois des membres des Slugs et de René Binamé, depuis les brutalités sur scène jusqu'à leur libération, n'ont à aucun moment été fouillés!
Selon d'autres informations, le lieutenant de gendarmerie Malaise, de Namur, à l'origine de la descente de Namêche, aurait récemment tenté de faire fermer la salle de concert des Boscailles (Eghezée) pour non-conformité aux normes de sécurité, à la veille d'un concert des Slugs.
On se rappellera aussi les récents problèmes du festival à 20 balles organisé régulièrement par le Foyer Culturel de Braine l'Alleud et dont la onzième édition en date du samedi 4 mars a été purement et simplement interdite par le bourgmestre Monsieur Hendrickx, sur base d'un rapport de police faisant évasivement état de délinquance, de vandalisme et, alibi suprême, de trafic et consommation de drogue.
Tout cela laisse perplexe sur les motivations réelles de ces manoeuvres. Une inquiétude légitime gagne tant les musiciens que les organisateurs de concerts et le public: ils seront à tous les coups lésés par ce qui apparaît aujourd'hui comme le durcissement d'un appareil répressif totalement inadapté.
JC Pirnay et O Maniet,
Monsieur le Lieutenant,
Ce samedi premier avril, le groupe "René Binamé et les Roues de Secours"dont nous sommes respectivement claviériste et chanteur devait se produire au Foyer Jules Bodart de Namêche à l'invitation de l'A.S.B.L. "Le Hangar", en compagnie des groupes "Les Slip's"et "Les Slugs"(Olivier Maniet est également batteur de ce dernier groupe). Dans les circonstances que vous connaissez, le concert des "Slugs"a été interrompu et le concert de "René Binamé"empêché.
Sans qu'il n'y ait à aucun moment provocation de notre part, nous avons tous deux été victimes de violences de la part de gendarmes. Vous pouvez lire dans le communiqué de presse que nous joignons à cette lettre le récit détaillé de ces faits.
Nous avons lu avec attention comment, dans le journal Vers l'Avenir du mardi 4 avril, vous justifiez l'opération de Namêche. A aucun moment vous n'émettez de réserves sur les violences qui ont accompagné cette opération. A aucun moment vous n'abordez les préjudices moraux et financiers subis par les groupes, les organisateurs et le public.
Plus précisément, certaines de vos réponses aux questions du journaliste sucitent en nous étonnement et interrogations.
Vous dites: Nous avions eu écho de plaintes concernant la présence de toxicomanes à ces concerts"
Qu'entendez-vous par "ces concerts"? S'agit-il des concerts qui ont lieu à Namêche, s'agit-il des concerts des groupes à l'affiche ce jour-là, s'agit-il plus largement des petits concerts rock en général?
Comment conciliez-vous cette affirmation avec cette autre qui sert de titre à l'article: "Rassurer les parents, sans viser en particulier les concerts"?
La notion de toxicomanes est particulièrement équivoque. Considérez-vous celui qui fume son joint du samedi soir comme un toxicomane?
Vous dites: "Une intervention comme celle de samedi a un aspect répressif un peu plus voyant que d'autres"
Ces doux euphémismes témoignent d'une conception bien inquiétante du rôle de la gendarmerie.
Doit-on comprendre que l'opération de Namêche s'est déroulée comme elle le devait, que le principe d'une opération de ce type est d'opérer de manière musclée, que la confirmation du délit supposé est facultative. On en arrive à une situation absurde où le soupçon, fondé ou non, justifie la répression.
On comprend mieux, après vos explications, que les bousculades aient précédé les fouilles et que trois des musiciens maltraités et emmenés à la gendarmerie de Namur n'aient pas même été fouillés. On comprend mieux, et on s'inquiète. Qui peut dire où s'arrête cette logique?
Vous dites: "Nous voulons que les parents qui laissent leurs enfants aller à un concert soient rassurés quant aux efforts de la gendarmerie"
Rassurer les parents quant aux efforts de la gendarmerie est une chose, rassurer les parents quant à l'absence de risques que pourraient courir leurs enfants en se rendant aux concerts en est une autre. En choisissant de réprimer à tort et à travers, vous prouver sans aucun doute votre volonté d'agir sur le terrain, mais le climat d'insécurité que vous créez par vos méthodes sans nuances ne rassurera personne.
Jusqu'à ce jour, nous n'avions jamais été l'objet de violences physiques ni lors d'un concert où nous jouions ni lors d'un concert auquel nous assistions, ni à Namur ni ailleurs, ni en Belgique ni ailleurs. Ce sont des gendarmes qui se sont octroyé le privilège de mettre fin à cette longue suite de concerts sans histoires.
Que dire encore de l'utilisation du terme "laisser"? Pensez-vous que les parents "laissent"aller leur enfants aux concerts, qu'il s'agit d'une faiblesse de leur part? Sachez qu'au contraire bien des parents ne "laissent"pas leur enfants aller à des concerts mais les y conduisent ou les y accompagnent.
Vous dites: "Nous avons demandé de rallumer la salle, quelques musiciens n'ont pas voulu obtempérer malgré plusieurs demandes de notre part"
Permettez-nous de rétablir les faits
Quand les musiciens ont été molestés, les lumières étaient rallumées. Il semble que la motivation de ces violences ait été la volonté d'interrompre le concert qui perdurait. Mais à aucun moment, les musiciens n'ont été invités à cesser de jouer. Il me semble bien excessif de qualifier de refus d'obtempérer le non-respect d'une demande qui n'a pas été formulée.
Vous dites: "Certains organisateurs avaient l'air de minimiser la gravité de ce que l'on ait trouvé du haschisch dans leur salle"
Pensez-vous sincèrement que la présence de haschisch à un concert soit de nature à nuire à la sécurité ou à la santé publique? Sans rentrer trop avant dans un débat qui ne fait pas l'objet de cette lettre, nous tenons à mettre certains faits en évidence.
Les drogues les plus répandues dans les petits concerts rock sont l'alcool et le tabac, consommés le plus souvent sous forme de bière et de cigarette (les apéritifs, les alcools forts, les cigares et les pipes sont plutôt rares). Il est fort probable que cela restera le cas lorsque le cannabis et ses dérivés seront légalisés.
La répression ne sera jamais un moyen efficace de limiter la consommation de drogue. Tout au plus peut-elle arriver à déplacer la consommation des lieux publics vers les lieux privés. En arriverez-vous alors à effectuer des descentes "anti-drogues"dans les appartements d'où s'échappe une fumée suspecte?
Vous dites: "L'opération fait des vagues parce que c'est une première dans la région namuroise"
Vous attendez donc de la seconde opération qu'elle suscite moins de vagues.
Fort bien, nous nous associons à votre souhait. Pour des raisons malheureusement bien différentes, cependant.
Nous espérons qu'à l'avenir vous usiez de méthodes moins expéditives.
Vous semblez espérer que l'opinion s'habitue à vos excès.
Nous vous saurions gré de bien vouloir donner suite à cette lettre. Nous informerons de vos réponses ou de vos non-réponses les nombreux spectateurs du concert de Namêche qui nous ont contactés depuis lors, ainsi que les journalistes et responsables politiques avec qui nous sommes en contact.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Lieutenant, l'expression de notre considération.
Ol. Maniet et J.-Chr. Pirnay
Nous n'avons jamais, il est vrai, éprouvé d'affection particulière envers la gendarmerie, cette prétentieuse milice encasernée, paraît-il démilitarisée, en service toujours et partout, avec ou sans ses galons. Mais c'est sans jubilation que nous avons vu certaines thèses se vérifier une fois encore, une fois de trop. L'excès de zèle, voire le dérapage, semblent constitutifs du fonctionnement de la gendarmerie, de l'état d'esprit qui l'anime. A Namêche, la démonstration n'en est pas venue de nous. Molenbeek vient de le vivre plus tragiquement, quand un chargeur se vide sur les occupants d'une voiture suspecte.
Concernant les stupéfiants comme au sujet de l'alcool, du tabac et de choix gastronomiques, vestimentaires ou affectifs, nous estimons ne pas avoir à faire de nos goûts une norme, ni à prôner telle ou telle pratique. Mais face aux hypocrisies et aux aberrations du système actuel, la neutralité est complice. C'est pourquoi nous avons tenu à élargir le débat aux critiques qui s'élèvent de plus en plus contre la prohibition des stupéfiants et son cortège d'effets pervers.
Après nos démarches de diffusion de l'information, après le dépôt de plaintes quant aux préjudices personnels, la nécessité s'est en effet imposée de se pencher sur le contexte qui rend possibles des événements comme ceux de Namêche. En fin de compte, rien ne peut les justifier: dans l'attente des modifications législatives, nous devons d'ores et déjà être reconnus à même de gérer sereinement nos activités et les risques afférents, comme cela se passe d'ailleurs très bien quand les pandores ne débarquent pas. Qu'en tirer comme constats pour le public, les groupes, les organisateurs, la gendarmerie, les mandataires politiques? Esquisses de réponses.
Le public.
Sans verser dans le martyrologe, force est de reconnaître qu'on montre souvent les jeunes du doigt, faisant peser sur leurs activités suspicion voire réprobation moralisatrice. Les donneurs de leçon n'admettent pas qu'une génération n'a pas à vivre comme la précédente. Une soirée ou un concert ne sont pourtant pas des faits particulièrement révolutionnaires, même si nous tentons peut-être de concilier festivité ludique et lucidité sur le monde extérieur.
Voilà bien un des aspects les plus choquants des événements de Namêche: la gendarmerie est intervenue avec un mépris déclaré du public, alliant présomption de culpabilité et certitude de pouvoir agir impunément face à des personnes incapables de faire valoir par après leur bon droit, et leur droit au respect élémentaire. Un gendarme flanqué d'un chien renifleur nous a déclaré sans rire: "j'ai des enfants et je ne voudrais pas qu'ils deviennent comme vous". Comme nous... qu'est-ce à dire? Devons-nous réciproquement nous souhaiter des enfants enclins à ces préjugés de caserne?
"Rassurer les parents", déclare le lieutenant Malaise (Vers l'Avenir, mardi 4 avril 1995) pour justifier l'intervention dont il assume la responsabilité. Je vous prie de croire que mes parents, les parents présents ou de spectateurs présents n'ont en aucun cas été rassurés par la brutalité arbitraire qui peut s'abattre sur un paisible concert, sans aucune sommation. De nombreux témoignages en ce sens se sont manifestés spontanément: c'est une bonne revanche sur le mépris.
Le lieutenant Malaise affirme que ceci n'est qu'une partie de son travail, et qu'il se rend également dans les écoles pour dissuader les jeunes de consommer de la drogue. Une fois pour toutes, cessons de croire naïvement qu'un gendarme ait jamais eu le moindre effet dissuasif sur la consommation de substances dont la séduction n'a d'égale que l'interdiction et la diabolisation. Seul un consommateur est crédible dans ce rôle d'information sur les risques, expérience qu'à ma connaissance le lieutenant Malaise ne revendique pas. A fortiori, après le sinistre spectacle que ses hommes ont donné sur la scène du Foyer Jules Bodart, vous l'imaginez débarquer dans votre classe pour brandir le fléau de la drogue? Soyons sérieux, nous n'avons été que trop infantilisés.
Les musiciens.
Tout en ne versant pas dans la paranoïa, on ne peut nier que les musiciens ont été particulièrement visés. Ce choix fut peut-être prémédité, et relèverait alors des mêmes préjugés dont le public est victime, mais il a également découlé de l'esprit de l'intervention, et de la mentalité de l'avant-garde matamoresque qui fut envoyée dans la salle au pas de charge (c'est d'ailleurs en spectateur que j'en fis les frais). Il faut ajouter que de la scène, il est impossible de comprendre ce qui se passe dans la salle. Les gendarmes n'ont rien demandé ni expliqué aux Slugs, ils ont menotté et frappé.
A qui la gendarmerie cherche-t-elle à plaire en menant pareille opération démesurée et relativement inefficace quant à ses buts avoués? S'il est trop tôt pour le dire avec précision, nous sommes dans tous les cas fermement déterminés à réagir énergiquement contre toute tentative d'intimidation ou de discrédit de nos activités musicales, de celles de tout autre groupe susceptible d'être confronté aux mêmes déboires, ainsi que du public qui y est fidèle. Il y va de l'intérêt de tous de faire obstacle à cette logique de contrôle répressif.
Les organisateurs.
Des années de travail pour établir la confiance entre les différents acteurs d'un projet culturel peuvent être discréditées par une descente. Dans le cas présent, tant le public que les groupes ont heureusement compris que l'asbl Le Hangar ne pouvait être mise en cause, et qu'il importait de marquer notre solidarité face à un préjudice commun.
La gendarmerie voudrait bien solidariser les organisateurs et animateurs à sa besogne répressive. En tant que musiciens et spectateurs, nous nous opposons avec véhémence à cette logique. Tout le monde connaît les milieux et les lieux où des drogues circulent en quantité (discothèques, show-biz friqué), ainsi que le lien entre l'exclusion sociale et les risques d'atteintes à la santé publique. La prise ridicule -de leur propre aveu- réalisée par la gendarmerie à Namêche ne sera pas pour nous convaincre que la drogue poserait un problème de santé ou de sécurité dans ce type d'événements culturels, que nous fréquentons depuis une douzaine d'années. Les certificats médicaux qui accompagnent nos plaintes tendent plutôt à démontrer que c'est la gendarmerie qui pose de sérieux problèmes de santé publique.
Nous voilà en porte-à-faux. Nous sommes persuadés, par les faits, que la consommation de drogue aux concerts est un fait mineur en regard du débit de bière par exemple, qui n'est à juste titre plus remis en cause. De plus, nous affirmons la capacité des personnes en présence à gérer sur place les risques qui y sont liés. Or, sous la pression sournoise du risque d'agents en civil (à nous à présent de les surveiller et de les dénoncer), et sous la menace de descente de cow-boys, nous sommes forcés d'adopter une position pragmatique d'appel à la discrétion (quant à la bière, pour l'instant, ça va). Nous ne le faisons qu'en demeurant très clairs sur nos principes. Nous regrettons que face à cette menace latente, d'autres s'engagent tête baissée dans une logique de renforcement répressif, sans s'en expliquer clairement: ce fut le cas lors du Quasimorock de Ciney (dont les organisateurs ont craint un remake de Namêche), où les fouilles incessantes frisaient le délire. Sans avoir le courage de s'expliquer, on devient l'allié objectif de la gendarmerie et de la prohibition. C'est un fait très préoccupant.
La gendarmerie.
Nous nous sommes spécifiquement expliqués sur les agissements de la gendarmerie dans nos dépositions, dans notre communiqué de presse, et dans nos plaintes au Parquet. Nous avons également adressé une lettre au lieutenant Malaise, afin de l'interroger sur ses déclarations à la presse, qui suscitent en nous interrogations, inquiétudes et consternation. Nous ne manquerons pas de répercuter les suites qu'ils y donneront.
Les mandataires politiques.
On connaît la propension des pouvoirs locaux à participer à la suspicion jetée sur les concerts fréquentés par les jeunes. On citera le cas récent du Festival à 20 Balles de Braine-l'Alleud dont la 11ième édition fut interdite, le jour même, sur base d'un rapport de police commandité par le Bourgmestre et invoquant évasivement drogue et délinquance. L'autorisation négociée depuis lors est effarante de restrictions absurdes. On citera aussi les difficultés qu'a connu La Zone à Liège, à faire reconnaître son travail d'animation culturelle auprès des autorités de la ville, sous prétexte de nuisances avérées non fondées. On pourrait malheureusement faire pleuvoir les exemples. Les mêmes esprits malveillants se plaignent du "désoeuvrement des jeunes"lorsque les organisateurs se découragent et que les salles se ferment.
Prohibition-répression
En ce qui concerne la toxicomanie, la politique prônée au niveau fédéral se résume à la prohibition et à la répression: c'est plutôt d'un refus de gérer et d'une absence de politique qu'il faudrait parler (voir dans ces pages, "Actualité de l'antiprohibitionnisme"). Lors d'un récent débat de la Liaison Antiprohibitionniste à Bruxelles, nous avons eu l'occasion de faire part de notre expérience de Namêche. Yvan Mayeur, député socialiste auteur d'un projet de loi antiprohibitionniste, a dit s'être déjà heurté à la même logique au sujet d'un concert à Bruxelles.
Au niveau local, une opération d'intimidation comme celle de Namêche n'est possible qu'en l'absence de prise de position claire des responsables politiques du cru: face à la diabolisation des activités culturelles du public jeune, le silence est complice. Dans cette brèche, le terrain est cédé aux adeptes de l'intimidation musclée, forts de l'alibi "anti-drogue". C'est bien de cela dont nous avons fait les frais. Nous avons interpellé en ce sens Claude Eerdekens, député-bourgmestre d'Andenne, Jean-Louis Close, bourgmestre de Namur, et Philippe Mahoux, sénateur de Namur et ministre à la Communauté Française. Tant que l'anachronique chasse aux sorcières se poursuivra, nous n'admettrons jamais qu'elle soit menée comme à Namêche, ni qu'elle serve de prétexte pour viser la scène rock et son public. A suivre...
ESGIBT...
Beastie Boys "Sabotage"ou René Binamé
Samedi 1er avril, lors du concert de "The slip's", "The slugs"et "René Binamé et les Roues de Secours", une descente de gendarmes a eu lieu.
Quelles étaient leurs motivations?
Saboter un concert de rock libre qui révèle le vrai visage du monde ou trouver de la drogue, mais quelle drogue?
Si vous voulez vraiment trouver de la drogue, ne pensez-vous pas qu'il y a d'autres endroits?
De la manière dont vous l'avez fait, nous ne croyons plus en démocratie (liberté d'expression plus précisément). N'y a-t-il pas une façon plus discrète de trouver de la drogue que de débarquer lâchement à plus de vingt moustachus armés d'un fusil et accompagnés de chiens.
Au lieu d'arrêter violemment un petit camé éventuel dans un concert bien gentil, ne faudrait-il pas trouver les gros dealers. Ne faudrait-il pas aider les drogués à la place de les arrêter? De plus, vous êtes censés lutter contre la violence et non pas l'engendrer.
Veuillez agréer, Messieurs, l'expression de nos sentiments les meilleurs,
suivent 7 signatures.
Malaise chez les jeunes,
pétard mouillé ou poudrière cachée.
Je reçois, mardi, le communiqué en annexe (ndlr: il s'agit de notre communiqué de presse reproduit plus haut). Il faisait suite à toute une série d'informations lues dans la presse et à des interpellations téléphoniques faites chez moi par des jeunes présents lors de la fameuse descente de police à Namêche.
Par ce communiqué personnel, je tiens à assurer l'A.S.B.L. le Hangar, tous les musiciens présents et le public de ma totale solidarité dans cette affaire.
Mais plus que de solidarité, je pense qu'ils ont besoin de soutien et de relais. Il me paraît complètement insupportable qu'une organisation de concert, un regroupement de jeunes soit ainsi brutalement interrompu par les forces de l'ordre. Pendant des années, sur les antennes de la RTBF, j'ai participé à la production d'émissions rock (Energie douce et Perfecto). Depuis des années, j'assiste à des concerts rock. J'en ai beaucoup organisé aussi, à Namur et dans la région. Toujours, les forces de l'ordre ont dangereusement amalgamé Rock-Violence-Drogue-Délinquance. Un glissement dangereux qui ne fait que s'amplifier au fil des ans. C'est aux concerts rock qu'on sort les chiens policiers, pas dans les soirées du Lion's Club, pas dans les meetings politiques, pas dans les concerts de Nana Mouskouri. Ce choix n'est jamais objectivement justifié.
Les participants à la soirée du 1 avril à Namêche se sont trouvés confrontés à une descente anti-drogue très musclée et sans commune mesure avec le résultat de l'opération. Des musiciens ont été molestés sans raison, des organisateurs et des jeunes ont été lésés. Le concert a été arrêté. On veut les jeunes calmes, cocooneurs, respectueux de l'ordre établi. On ne veut pas entendre les bombes qui grésillent en sous-sol. On les dit mous, individualistes, on ne remarque pas qu'ils cherchent simplement à exister et que le fossé se creuse entre la jeunesse et le reste de la population.
Dans les émissions radio auxquelles j'ai travaillé, nous avions établi un contact permanent avec les jeunes, une ligne ouverte 24 heures sur 24. Un bon contact qui m'a beaucoup appris. La plupart d'entre eux ont perdu toute confiance, ils ne se sentent ni respectés, ni écoutés, ni acceptés. Ils vivent dans leur monde, avec leur culture, leur musique, leur cinéma, leur amis.
Poudrière cachée, et pas la poudre qu'on cherche, on va faire de notre jeunesse une bombe à retardement "Si nous n'y prenons garde, disait récemment Alain Touraine, "ça va péter un de ces jours". Beaucoup d'entre eux ne votent pas encore, ils ne sont pas encore organisés. On pense donc pouvoir, impunément leur imposer des règles qui ne respectent pas leurs aspirations. Cette intervention agressive de la gendarmerie à Namêche est scandaleuse. Vise-t-on la protection de l'ordre à tout prix ou la protection de la jeunesse? L'ordre doit-il passer par la répression et la brutalité? Fallait-il incriminer ces festivals rock et jeter ainsi insidieusement le discréditer sur ces petites salles (trop peu nombreuses dans nos régions) et leurs animateurs? Un des gendarmes affirmait, sur les antennes de Canal C (ndlr: la chaîne télévision locale de Namur), "partout où il y aura de la drogue, on continuera des opérations comme celle-ci. les parents doivent être rassurés quand leur enfants vont aux amusement". est-il vraiment rassurant de penser que vos enfants risquent le tabassage à un concert paisible? La politique de la jeunesse se résume-t-elle à ces trois mots: ordre, suspicion et répression? Doit-on craindre de voir disparaître les concerts rock dans notre région? est-ce vraiment là qu'il faut chercher les vrais vendeurs de drogue? Non à voir les résultats de cette opération coup de poing.
L'A.S.B.L. Le Hangar vient de se voir reconnue et subsidiée. Elle est considérée comme le lieu d'un projet riche en faveur des jeunes. Dimanche prochain, le Quasimorock se déroulera à Ciney. Je resterai donc très attentive à ce qui s'y passe et les assure de tout le soutien que je pourrai leur donner.
Les jeunes, on ne parle jamais d'eux, je profiterai donc de ma position de 6° candidate effective sur la liste socialiste au Conseil Régional Wallon pour être leur porte-voix. Je les connais bien, je suis à leur disposition pour les écouter et répercuter leurs souhaits, leurs projets, leurs réflexions.
"SO BE IT"(Pump up the volume).
Dany Martin.
Un classique du folklore policier, mis en scène par le Lieutenant Malaise, interprété par la troupe de théâtre amateur de la gendarmerie de Namur, adapté en comédie musicale grâce à la participation bénévole mais involontaire des Slugs et des Binamés. Merci à la gendarmerie nationale qui a prêté son matériel.
Ce premier avril à Namêche, deux scénarios étaient en présence. Un premier scénario que nous appellerons le scénario "soft". La soirée s'interrompt en douceur pour quelques dizaines de minutes, le temps pour ces messieurs de la maréchaussée de procéder aux contrôles d'identité et aux fouilles d'usage, puis ces messieurs retournent à leur caserne accompagnés de quelques malchanceux détenteurs de substances illicites et tout rentre dans l'ordre, la soirée reprend son cours comme si rien ne s'était passé.
Si l'on en croit les gendarmes, ils avaient choisi ce scénario mais ceux qui ont assisté à l'irruption dans la salle des acteurs auront bien du mal à le croire. Peut-être tout se passe-t-il bien lors des répétitions mais, manifestement, quand il s'agit de jouer devant un public qui n'est pas conquis d'avance, certains acteurs perdent les pédales. Il semble qu'à Namêche, personne n'était là pour leur rappeler leur rôle. Le metteur en scène était étrangement absent et très vite on a eu du mal à reconnaître la pièce. Quelques acteurs s'en prennent aux spectateurs qui ont eu le malheur de ne pas applaudir dès l'ouverture des rideaux, les trois coups retentissent et l'écho les démultiplient tandis que commence une nouvelle prestation improvisée dans laquelle chacun des gendarmes-acteurs fini par trouver sa place. Nous appellerons cette deuxième option le scénario "hard"par opposition au précédent.
Chaque acteur a le choix entre trois personnages.
Le nerveux incontrôlable qui tout à coup agresse le premier qui a le malheur de lui adresser la parole au mauvais moment. Ne me demandez pas de vous expliquer ce qui se passe dans sa tête au moment fatidique, cela m'échappe totalement, mais cela doit ressembler à ce qui se passe dans la tête d'un éléphant qui tout à coup décide de piétiner le premier venu même si en d'autre circonstances il ferait plutôt ami-ami.
Le salaud profond, la petite frappe qui ne s'énerve pas mais cogne avec calme et précision, c'est le plus méchant, c'est le plus dangereux.
Ou le sympa dans le fond qui préférerait être chez lui devant la télé et qui fait son boulot sans excès de zèle mais il est bien obligé, le pauvre, de taper avec les autres quand les autres frappent. S'il le peut, il essaiera de se tenir à l'écart des précédents, il préfère ne pas savoir et rentrer chez lui autant que possible l'âme en paix.
Ce trio fonctionne très bien, chaque rôle est indispensable aux deux autres. Le nerveux incontrôlable fournit l'étincelle qui permet au salaud d'intervenir tandis que le sympa rassure le public, à l'en croire, le scénario n'a pas changé, non, non, tout se passe bien, juste un spectateur qui a essayé de lancer des tomates mais on l'emmène à l'écart, juste pour lui expliquer que c'est pas bien. Le nerveux est efficace parce qu'il ne contrôle pas ses actes, le salaud est efficace parce qu'il ne s'énerve pas, le sympa est efficace parce qu'il croit à ce qu'il dit.
A Namêche, dés le début du premier acte, on savait à quoi s'attendre, le scénario "soft"a été bâclé, quel gâchis, quelle tristesse, quel échec, l'amateurisme était évident, l'interprétation nulle, la direction d'acteur inexistante. Zéro pointé pour toute l'équipe sauf les accessoiristes et les costumiers. Mais, très vite, la troupe est retombée sur ses pattes en réquisitionnant quelques figurants pour se rabattre en un clin d'oeil sur le scénario "hard"dans lequel elle était de toute évidence bien plus à l'aise. J'étais au nombre des figurants involontaires et puis affirmer que ce second scénario semblait bien rôdé et a été une grande réussite, les acteurs prenaient tous leur rôle très à coeur et se donnaient à fond. Encore bravo, ce fut du grand art.
Finalement, les gendarmes ont invités les figurants à les accompagner à la caserne, et ils ne se sont séparé d'eux que vers 4 heures du matin, c'est dire s'ils en étaient contents.
Le public, lui, en a eut pour son argent. Trois cents cinquante francs seulement pour un tel spectacle, une telle débauche de moyens matériels et humains, c'est donné. Nous ne pouvons malheureusement pas garantir que notre prochain concert offrira tant de rebondissements.
BINAM'...
Le 6 avril dernier, la Liaison Antiprohibitionniste (L.A.) organisait à Bruxelles une conférence-débat. A la tribune, les parlementaires qui ont déposé des projets de loi visant à légaliser les drogues: le sénateur Agalev Loozie, (proposition de loi d'octobre 1993), Yvan Mayeur, député socialiste (qui pour cause d'élections devra redéposer sa proposition s'il fait partie de la nouvelle assemblée), et Pierre Lenfant, sénateur PSC. A ne pas confondre avec le travail mené parallèlement par le sénateur PS Roger Lallemand en faveur des traitements de substitution, notamment à la méthadone.
Tous les orateurs se sont accordés sur l'inefficacité de la prohibition: c'est un non-choix, un refus de gérer la situation. Dans le dernier Alternative Libertaire (n° 173, avril 1995, disponible sur demande au 02/736.237.76), on a pu lire la déclaration de la L.A. au sujet du fumeux (!) plan drogue gouvernemental.
Pour de plus amples développements sur l'argumentaire de la Liaison et ses activités, sur la toxicomanie et sa répression, infos et documentation sont disponibles aux coordonnées mentionnées ci-après. La mise sur pied d'une permanence téléphonique est imminente, profitez-en.
"On voit mal ici, déclare la Liaison, comment des représentants de l'ordre public ou leurs auxiliaires pourraient instruire les jeunes sur les "bons usages"de produits illégaux. Faut-il le rappeler, la meilleure prévention contre l'abus de drogues est d'ordre socio-économique et doit agir sur les mécanismes pluriels de l'exclusion. En faisant l'impasse sur ces questions, le gouvernement fédéral propose de centraliser la gestion des problématiques de toxicomanie entre les mains du Ministère de l'Intérieur. Faut-il vraiment se réjouir du renforcement du contrôle répressif (...) ou s'en inquiéter?".
Le Ministère de l'Intérieur, sur le terrain, c'est la gendarmerie... Inutile de préciser que nous partageons les inquiétudes de la Liaison Antiprohibitionniste.
"Le plan drogue du gouvernement fédéral fait irrésistiblement penser à un coup de bluff médiatique. Confondant une fois de plus causes et conséquences, ce programme fait miroiter l'idée dangereuse selon laquelle le "fléau"des toxicomanies serait à l'origine de nos problèmes de société, et notamment du sentiment d'insécurité. Dans cet esprit, l'accent est mis sur l'intensification de la guerre à la drogue et sur la mise sous traitement des drogués. Ce leurre récurrent risque de nous coûter cher, de porter à conséquence sur la sécurité sociale et de renforcer des politiques sécuritaires".
Des diverses interventions entendues lors du débat du 6 avril, nous avons épinglé les quelques réflexions suivantes:
1. Drogues "dures"et drogues "douces"?
On serait tenté d'encourager cette distinction pour dédramatiser le haschisch, par exemple. Or, c'est justement une des dérives restrictives de la légalisation des drogues: saucissonner le problème, céder du terrain sur certaines substances pour mieux freiner sur d'autres. Pour maintenir l'indispensable solidarité entre usagers, tout en ne s'aveuglant pas, un autre angle de vue a été avancé: opérer plutôt la distinction entre consommation douce et consommation dure, quel que soit le produit consommé.
La distinction ne s'opère pas tant sur la quantité que sur le rapport psychique, voire affectif à la consommation. C'est nettement plus pertinent. On peut ainsi considérer que la consommation dure (d'alcool, de tabac, de stupéfiants, de médicaments) est un fait exceptionnel aux concerts, rock ou autre: c'est de fait peu compatible avec les raisons de se rendre à ce genre d'événements. Nous estimons de surcroît qu'organisateurs, groupes et public doivent être à même de faire face à ces cas où la santé et la convivialité sont menacées, sans avoir recours à la cavalerie des matraqueurs-menotteurs. La présence sournoise d'agents en civil ne peut d'ailleurs qu'entraver toute solution sereine.
2. Déprohibition? Légalisation?
Dans les propositions de loi, tout l'éventail existe entre la dépénalisation et les divers degrés de légalisation du trafic, de la consommation et de la détention de stupéfiants. Le contrôle de la qualité et des prix ne doit pas amener à légiférer de façon outrancière, en particulier concernant la consommation elle-même. Neutralisez les foudres moralisatrices, elles tombent un peu plus loin...
3. La parole aux usagers.
Les législateurs ne peuvent pas continuer à commettre l'erreur de tenir les associations d'usagers à l'écart de leur travail. Une politique de réduction des risques -individuels et collectifs- liés à la toxicomanie, menée parallèlement à la déprohibition, doit être recentrée sur l'usager et son expérience. Il est temps que l'on rompe avec les inefficaces et infantilisantes "campagnes de sensibilisation"menée par la gendarmerie.
Nous n'avions pas la prétention de faire en quelques lignes le tour de la question: pour en savoir plus et agir, reportez-vous sur les différentes coordonnées ci-dessous.
ESGIBT...
CASINO-ROCK
Les 7 et 8 avril avait lieu, à Ciney, le QuasiDuRock. Et là, surprise!! Habits de Soirée exigés c'est-à-dire pas question d'avoir dans les poches autre chose que du flouze pour t'offrir les services de la blonde nationale si tu voulais un peu (ou beaucoup) t'évader du normal. Pour que l'interdit fut bien respecté durant toute la soirée, un service d'ordre qui venait jusqu'à renifler l'odeur de ta cigarette que tu fumais à l'intérieur, ou qui te fouillait à l'entrée (y compris dans les cheveux, paquets de tabac ou cigarettes, poches etc...), ou encore qui a empêché le dépôt sur les tables, bar, etc... de tracts annonçant la semaine cannabique organisée à Liège fin avril. Ce soir-là, on a vu des mecs (pas tous) et des meufs (pas toutes) qui prenaient leur panard à humilier ainsi les gens qui circulaient!!
A l'interdit hypocrite d'une loi prohibitionniste s'est donc ajouté la participation active d'organisateurs sans aucun doute paniqués par la menace d'une intervention policière telle que celles de Namêche, Braine-l'Alleud ou Louvain-la-Neuve.
Décidément, les rapports entre le fric et la fête sont bien difficile à résoudre dans le Rauquen Roll.
Certes la loi qui rend certaines drogues illégales existe mais la loi sur la répression de l'ivresse aussi!!
Alors à quand l'Alcootest obligatoire avant de pouvoir recommander une bière au bar?
A quand les fan-coaching dans les concerts comme dans les match de foot?
Mais je devrais peut-être me taire pour ne pas donner des idées à ...
En tout cas, moi je crois qu'il faut plutôt chercher à trouver des alliés et des arguments pour combattre la prohibition de certaines drogues. Ne pas avoir peur d'en parler, pour faire ouvrir les yeux sur l'hypocrisie. Ne pas se considérer comme des malades mais comme des citoyen(ne)s comme les autres.
Un dernier petit mot au G.O. (gentils organisateurs). Avant, il n'y avait p'tête pas grand-chose qui bougeait rock mais ce qui est sûr c'est qu'après la multiplication de QuarduMondeRock, il ne restera pas grand chose.
Jean-Marie, animateur de La Zone
COmE-BACK PAPAL
Excommunions-nous, ça fait un bien fou!
Cette fois c'en est trop, j'en ai ma claque des voyages de Jean-Paul II en Belgique! C'est déjà le deuxième en 10 ans, sans compter le coup de la savonnette! Peste et pouah, diantre, fichtre et foutre! Peste soit du Monsieur Plus Blanc que Blanc qui va poser ses panards pontifes sur le tarmac de Melsbroek sans oser le pourlécher de peur d'un incident diplomatique à la belge! Peste soit de l'essaim de cons ensoutanés et de castrats du cervelet qui virevolteront autour de sa Sainteté à chacun de ses pas et de ses pets! Peste soit du complaisant poupin Daneels, peste soit du visqueux et reptilien Léonard! Peste soit de nos représentants encravatés qui courberont les vertèbres d'un air de dévotion feinte, le petit doigt sur la couture! Peste soit de nos souverains tout ragaillardis de prendre la pose aux côtés du tiaré roi des rois des cons! Peste soit du dernier quarteron de scouts catholiques et de crapauds d'encensoirs qui feuleront derrière les barrières Nadar, secoués de ridicules soubresauts convulsifs! Peste soit des opus-déistes fétides qui se pollueront d'aise rien qu'à la vue de la blanche calotte! Peste soit des plus bêlants entre tous, ceux qui voudraient voir Gaillot sur le siège de l'autre, comme si l'enfant de choeur d'Evreux allait sauver le monde parce qu'il ne pense pas comme Pasqua! Peste soit des rotatives opportunistes qui vomiront leurs flots de criminelles niaiseries papophiles! Peste enfin soit du Gloupier s'il entarte Karol avant moi!
ESGIBT...
Dans sa dernière encyclique une fois encore consacrée à la vie (après le gâchis de la sienne, on se méfierait), à nos amours (qu'il s'est refusées) et à la chaise-électrique (qu'il affectionne quand même), Jean-Paul II renoue avec la vieille hantise ecclésiastique pour la démocratie et en appelle à l'insoumission envers les lois qui heurteraient notre conscience morale. Si nous ne pouvons le suivre dans son délire obsessionnel de la "Loi Naturelle", révélateur d'une fatigue cérébrale du grand âge, nous en tirerons toutefois un appel à l'action autrement plus enivrant. Cessons en effet de nous plier aux lois anachroniques de financement du culte et soustrayons cet illégitime denier de nos impôts! Le chiffre habituellement cité de 1200 frs annuels par contribuable est d'ailleurs largement sous-évalué puisqu'il procède d'une division des 12 milliards de budget par le nombre total d'habitants.
Quel est cet Etat pour financer une secte criminelle et dictatoriale? Combien de localités du pays où par intégrisme opportuniste, voire par peur imbécile des foudres divines, le pharmacien ne vend plus de capote? Le silence infâme du pape sur l'épidémie de Sida serait-il moins machiavélique que quelques litres de sarin versés dans le métro japonais par un sinistre gourou du même acabit? Pour sûr, mon cher Jean-Paul, allégeons le fardeau de lâcheté de notre conscience morale: vive la désobéissance, et ne ratons surtout pas pareille occasion de déroger également par tous les moyens aux règles d'accueil des chefs d'Etat étrangers: c'est pas tous les jours qu'une totale ordure de ta trempe débarque dans nos contrées!
ESGIBT...